Sabrina Weldman,

revue Mouvement

« Interaction entre la parole et la musique

C’est sous le signe de l’union que travaille Marie Ballet. C’est à la difficile et désirée communion entre les êtres que tend sa mise en scène de L’Opérette imaginaire. Raison pour laquelle, du texte de Novarina, L’Opérette imaginaire, acte ne conserve que les parties les plus chorales et rythmiques – le prologue et l’acte 3.

Cette création, qu’elle a souhaitée ludique, physique et métaphysique, Marie Ballet l’a conçue en étroite collaboration avec le musicien Jean Bellorini et avec Air de Lune, une compagnie dont la spécificité réside dans le rapport théâtre-musique. Cet aller-retour entre le mot et le son articule ici le conflit qui se joue. Car le spectacle tout entier est une tentative de lutter contre le drame de l’animal parlant et de le dépasser. En sorte que l’interaction entre la parole et la musique exacerbera ce qui désunit les êtres avant de transcender leur division. (…) Campés dans un espace à mi-chemin du cabaret et de la fête foraine – qui contraste avec leur drame intime –, les personnages, extrêmement différents les uns des autres, représentent la diversité d’une humanité chahutée par les malentendus de la communication, d’une humanité rassemblée mais pas encore à l’unisson. Le verbe contemporain de ces solitaires se cognera à de liturgiques chants classiques, des « Ave » et des « Alléluia ».

Ereintés par leur combat, ils glisseront peu à peu vers la folie : c’est alors que leur parole se transmuera en musique. En sensations et émotions qui les ouvriront à la rencontre de l’autre. (…) Emerge la mémoire des drames de l’humanité… en même temps que les personnages atteignent enfin la possibilité de dépasser leur propre drame.  »

(janvier-mars 2006)